Une époque formidable
Par le gros bout de la lorgnette…
La seule chose qui
pourrait surprendre de la part de Denis Olivennes, c’est que ses conclusions
parviennent à remplir une feuille A4 comme il l’avait annoncé.
En effet, le discours
actuel cherche à imposer une vision partielle et faussée de ce qui est en jeu.
Comme d’habitude, il suffit de considérer la configuration d’ensemble : pour
simplifier, la chaîne traditionnelle relie les créateurs aux consommateurs de
biens culturels par l’indispensable vecteur des
producteurs/distributeurs :
Dans ce schéma, c’est le
distributeur qui a le contrôle du fonctionnement de l’ensemble.
Or le web court-circuite celui-ci :
On voit que :
L’existence des créateurs
n’est pas remise en question.
On ne peut rendre responsables de cette évolution ce qui serait des formes déviantes de consommateurs (les utilisateurs du p2p)
Donc :
Le financement de la
création ne dépend plus exclusivement des producteurs établis, avancer cet
argument n’est de leur part qu’un épouvantail. De nouveaux circuits de
financement et de rémunération peuvent s’installer sans leur intermédiaire.
Il n’y a péril que pour le pouvoir des
distributeurs. D’une manière
générale, il n’y a pas une crise du livre, du cd ou du dvd, mais une crise de
l’édition. Le modèle de distribution contrôlé ne peut pas intégrer l’apparition
des nouveaux circuits de diffusion, de partage, de collaboration.
Alors :
L’avis d’un distributeur
(inutile de revenir sur le statut de M. Olivennes) ne peut que refléter des intérêts privés sous couvert, évidemment,
de l’intérêt général.
Dans un contexte où le pouvoir
politique a fait le choix de soutenir l’offre par rapport à la demande, il est
logique de prendre des mesures qui rassurent les producteurs. Cela ne justifie
pas l’importation du modèle états-unien
(le DMCA et les mesures de filtrage et de répression qui l’ont accompagné), qui
est ancré dans une idéologie radicalement différente de celle de la France (le copyright par
rapport à la philosophie des droits d’auteur), et dont les méthodes ont
toujours démontré leur inefficacité.
Cerise sur le
gâteau : dans les nombreux entretiens que M. Olivennes dispense dans tous
les médias, l’évocation d’un souci de pédagogie est un des arguments principaux
d’un discours dont le formatage est exemplaire. Prôner la pédagogie du coup de
règle sur les doigts risque bien de lui amener le bonnet d’âne qui
l’accompagne.